Vraisemblablement composées dans la seconde moitié du XIIIe siècle, les monumentales Enfances Renier mettent en scène l'extinction du lignage de Guillaume d'Orange et l'ascension du petit-fils du célèbre Rainouard au tinel. Enlevé à sa nourrice, Renier, fils de Maillefer, est vendu par son ravisseur à un marchand qui le remet en tribut à l'émir de Venise. Jeté aux lions, l'enfant est recueilli par la fille de l'émir. Cette dernière décide de l'élever en secret. Auréolé de tous les dons, Renier connaît une enfance, puis une adolescence heureuses, jusqu'au jour où il prend conscience qu'il est un trouvé. Ignorant les larmes de sa protectrice, qui s'est éprise de lui, il part en quête de ses origines. S'ensuit une série de péripéties qui voit le héros retrouver ses parents, épouser sa promise et aider l'héritier du trône de Grèce à reconquérir ses terres. Empreinte de romanesque, cette chanson de geste tardive, sans doute remaniée par un trouvère qui aurait suivi Charles d'Anjou en Sicile, prolonge, parachève et dépasse la geste guillaumienne. Grâce à cette traduction, le lecteur d'aujourd'hui pourra apprécier un précieux témoin de l'évolution du genre épique au tournant des XIIIe et XIVe siècles.
Aiol, chanson de geste conservée par un seul témoin, constitue, avec Elie de Saint-Gilles qui la précède dans le manuscrit, la « Geste de Saint-Gilles ». Mêlant les exploits chevaleresques au comique parfois le plus cru, le poème relate les aventures du héros éponyme, célèbre au Moyen Âge pour sa naïveté et sa pauvreté. Aiol part à la reconquête des biens et de l'honneur de son père Elie, calomnié par le traître Makaire et exilé par l'empereur Louis. Ses périples le conduiront à travers la France, en Espagne, et même au-delà de Venise : il deviendra un redresseur de torts et un pourfendeur de brigands, affirmera sa valeur morale et gagnera une épouse, la belle Mirabel. Avec ses 11 000 vers, cette chanson enchaîne, sur un rythme soutenu, les épisodes les plus variés et propose un tableau assez complet de la thématique épique à la charnière des XIIe et XIIIe siècles. La copie picardisante du texte associe alexandrins et décasyllabes d'une coupe très rare (6/4).